Théâtre antique en France

Projet scientifique

Historique
Initié en 2008, le projet « Théâtre antique en France » part du constat de l’absence d’instrument documentaire spécifique concernant les mises en scène du théâtre grec et romain en France, dans un contexte où la présence de ce corpus dans la création théâtrale internationale fait l’objet d’un intérêt croissant. De la somme plusieurs fois réactualisée d’Helmut Flashar (Inszienierung die Antike, Das griechische Drama auf der Bühne von der frühen Neuzeit bis zur Gegenwart, première édition 1991) à la base de données d’envergure mondiale de l’Archive of Performances of Greek and Roman Drama de l’université d’Oxford, ou celle développée, à l’échelle européenne, par le European Network of Research and Documentation of Performances of Ancient Greek Drama, la recension des productions modernes du répertoire antique bénéficie de l’attention grandissante des spécialistes, du côté des études classiques comme des études théâtrales.

Malgré un certain nombre de travaux – ceux, pionniers, d’Evelyne Ertel sur les représentations de 1844 à 1975, ou les thèses plus récentes de Sylvie Humbert-Mougin sur les tragédies grecques à la Belle-Epoque ou de Romain Piana sur Aristophane – le domaine français restait à l’écart de ce mouvement, en l’absence de théâtrographie récapitulative ; il était, par ailleurs, mal représenté dans les recensions internationales. Dans le sillage des travaux du Groupe de recherche « Théâtre antique et modernité », créé à la Sorbonne Nouvelle en 2005 par Evelyne Ertel et Claire Lechevalier, le projet d’un répertoire cumulatif des mises en scène françaises et représentées en France du théâtre antique a vu le jour. Soutenu dans sa phase d’amorçage par la Maison des Sciences de l’Homme, il bénéficie ensuite de l’appui de l’Institut de Recherche en Etudes Théâtrales de la Sorbonne Nouvelle. En prenant pour point de départ les recensions d’Ertel, Humbert-Mougin et Piana, il réunit des chercheurs intéressés à la question de la mise en scène des classiques autour d’un programme de repérage et de recherche systématiques des représentations du passé, et de veille concernant les spectacles à l’affiche.

Méthodologie
Si elle relève des études classiques quant au repérage de la présence des œuvres antiques dans les spectacles, la méthodologie développée dans la base de données est, pour ce qui est des informations concernant les représentations, celle des études théâtrales : l’objectif est d’être au plus près de l’événement spectaculaire et de ses conditions de production artistique, en privilégiant autant que possible les sources primaires (programmes de salle, textes représentés, expérience directe de spectateur, site des compagnies, témoignages d’artistes…).. L’approche dramaturgique est également convoquée pour ce qui est de l’usage du texte ou du « matériau » ancien dans les spectacles ; l’entrée « relation hypertextuelle » note ainsi, quand l’information est disponible, la plus ou moins grande proximité par rapport à l’original antique.

Le terminus a quo adopté, par convention, est le début du XIXe siècle. La première représentation donnée comme telle d’une œuvre antique à Paris est celle de l’Antigone de Sophocle dans la version de Paul Meurice et Auguste Vacquerie (1844). La prise en compte d’adaptations antérieures de la tragédie aurait conduit, du point de vue du statut auctorial du texte, à remonter jusqu’aux premières tragédies à sujet grec de la Renaissance. Le cas d’Aristophane, presque toujours adapté et très rarement joué en traduction littérale, autorise de remonter un peu plus haut dans le siècle, avec la Lysistrata d’Hoffman (1802). D’une manière générale, le facteur principal d’intégration d’une représentation au Répertoire est le critère auctorial : la mention explicite, dans le paratexte, de l’auteur ou de l’œuvre antique créée, adaptée voire réécrite. Il distingue l’adaptation de la récriture complète : ainsi l’Antigone de Brecht, explicitement adaptée de Sophocle dans la traduction d’Hölderlin, figure dans la base, contrairement à celle d’Anouilh. La présence effective de fragments de textes antiques dans les spectacles est aussi un critère d’admission.

Sans prétendre à l’exhaustivité, le Répertoire propose une recension assez complète des mises en scène professionnelles des années 1800 à 1975. Pour la période ultérieure, les représentations parisiennes ont été systématiquement explorées, notamment grâce au dépouillement de L’Officiel des spectacles. Une recherche assez large a été menée et se poursuit sur les spectacles en région, en particulier à la Société des Auteurs et Compositeurs Dramatiques, et à la Maison Jean Vilar d’Avignon pour ce qui concerne le Festival. Si les mises en scène amateur, innombrables et difficilement repérables, n’entrent pas a priori dans le champ de l’investigation, certaines d’entre elles figurent dans la base pour leur caractère remarquable. C’est notamment le cas des productions du théâtre universitaire du XXe siècle, particulièrement fécondes en matière de théâtre antique, dont le Groupe de Théâtre Antique de la Sorbonne a renouvelé l’approche.

Le niveau d’information concernant les spectacles est variable. Il va d’un simple repérage appelant des compléments d’investigation, à une documentation complète sur l’équipe artistique, la distribution et l’exploitation des spectacles. L’équipe de Théâtre antique en France accueille très volontiers les précisions, remarques et commentaires.